
J'ai pris le tamoxifène pendant plus d'un an en essayant d'oublier les sueurs et les chaleurs. Se sentir moite 10 minutes après être sortie de la douche, suer à grosses gouttes en réunion, devoir me mettre en chemise en plein hiver, dans le train… Puis, j'ai oublié un RDV avec ma tendre abeille. Puis un deuxième. Le boulot me rongeait encore et je m'oubliais. Résultat des courses, j'ai arrêté le tamoxifène pendant 2 ou 3 mois, en espérant pouvoir dormir sans jeu de jambes avec les draps. Au printemps, j'ai repris contact avec l'hôpital et la réalité, et j'ai sagement avalé la pilule.
Jusqu'au 21 août dernier où l'oncologue m'a dit de l'arrêter 1) pour diminuer les risques de phlébite dans le cas d'une éventuelle chirurgie, 2) parce que si j'étais de retour avec une métastase, c'est que le tamoxifène avait pas fait la job au complet pis que mes ovaires résistaient toujours et 3) que le ratio efficacité/innocuité jouait pas pour mon équipe.
Puisque je l'avais au bout du fil, je n'ai pas pu m'empêcher de lui faire part, non pas de mon découragement (moi! Ben voyons donc !), mais de mon questionnement. J'avais l'impression, lui ai-je dit avec un trémolo dans la voix, que j'étais en train de perdre la course. Que le cancer profitait de la période postopératoire pour se taper une nouvelle vertèbre et que c'était sans limite sauf celle du nombre des dites vertèbres. Je crois qu'elle a été un peu étonnée de ma question et moi encore plus de sa réponse. Parce que pour elle, la course n'avait même pas commencé. Et vlan ! Dans les gencives !
C'était comme si, depuis le 21 août je n'avais été qu'en période d'entraînement. Comme si, tout ce que j'avais déjà enduré, tout ce que ma famille, mes amis avaient déjà enduré, ne servait qu'à nous préparer au pire. Comme les cours prénataux, que j'ai bien sûr, boycottés. L'Autruche Attitude, ça ne date pas d'hier. Bref, j'étais sur le cul. Parce que ce qui me tient un peu, en plus du corset, c'est que je me dis que le pire est derrière et que bientôt ce sera le printemps. Mais, mais, en même temps, je comprends son point de vue, rappelez-vous le cheval et la grenouille ; en tant qu'oncologue, elle, son boulot, c'est la chimio.
Et c'est vrai, la chimio n'est toujours pas commencée. La radio non plus d'ailleurs …
Et zou !